La Silla, Paranal, ALMA, APEX et prochainement le E-ELT, l’organisation européenne ESO (European Southern Observatory) installée sous l’exceptionnel ciel du Chili est aujourd’hui l’observatoire astronomique le plus actif et productif au Monde. L’ESO conçoit et développe les systèmes technologiques les plus avancés pour l’astronomie, notamment avec des instruments qui intègrent en grande partie de l’optique adaptative, domaine dans lequel l’ESO est leader mondial.
Regardons maintenant ces observatoires sous un angle plus scientifique, qu’ont-ils permis d’étudier dans l’Univers ? Quelles sont les plus grandes découvertes réalisées avec les observatoires Européens au Chili ? ou quel nouveaux visages ont-ils pu donner à notre Univers ?
En réalité, un grand nombre d’observations de l’ESO ont littéralement révolutionné le monde de l’astronomie. Parmi ces découvertes que nous allons explorer dans cet article, vous en reconnaîtrez certaines !
⭐ Accélération de l’Expansion de l’Univers
Crédit : Y.Beletsky/ESO |
Jusqu’en 1998, l’hypothèse du ralentissement de l’expansion de l’Univers était l’explication la plus logique, puisque les masses gigantesques contenus dans les galaxies participeraient à freiner l’agrandissement de l’Univers via leur attraction gravitationnelle.
Tout a commencé dans les années 1990, lorsque des astronomes internationaux décidèrent d’étudier des phénomènes parmi les plus intenses visibles dans l’univers : des explosions d’étoiles en fin de vie appelées supernovae. Deux programmes de recherches de supernovae ont alors été lancés, en collaboration avec l’ESO qui figure comme l’un des principaux acteurs : le "High Red Shift Supernovae Search" et le “Supernova Cosmology Project”. Un type de supernova intéresse particulièrement les astrophysiciens celui des supervovae de type 1a dont l’évolution de la lumière émise après leur explosion suit une loi statistiquement uniforme au cours du temps. Ces supernovae peuvent donc être étudiées pour déterminer avec précision l’échelle des distances dans l’univers.
En utilisant les télescopes 3.6 mètres et New Technology Telescope NTT de La Silla, ainsi que d’autres télescopes d’observatoires américains, les scientifiques ont pu remarquer que les distances mesurées de ces supernovae étaient plus grandes que dans un Univers en expansion constante.
C’est cette mesure de distances qui, en 1998, prouva que l'univers subissait non pas une décélération de son expansion due à la force attractive que l’on connaît sous le nom de de force gravitationnelle, mais une accélération de son expansion par une force répulsive.
Cette découverte majeure a permis de confirmer une théorie émise par Albert Einstein en 1917 sur la constante cosmologique, qui contient des forces inconnues, s'opposant à la force gravitationnelle. Aujourd’hui, les astronomes pensent que la matière noire et l’énergie noire qui constituent environ 80 % de la totalité de l’Univers sont les causes de l’accélération de son expansion. Un des plus grands défis des télescopes des prochaines décennies sera de découvrir et caractériser les effets de ces hypothétiques matières et énergies noires.
⭐ Découverte d’un Trou Noir supermassif au centre de la voie lactée
Dans les années 1990, des campagnes d’observations menées avec l’observatoire New Technology Telescope (NTT) de La Silla ont pu permettre d’observer un amas d’étoiles extrêmement proche du trou noir central connu sous le nom de Sagittarius A* (SgrA*).
Après une dizaine d’années d’observations approfondies sur la trajectoire de ces étoiles (dont la majeure partie d’entres-elles furent réalisées avec les observatoires de La Silla et de Paranal) un article scientifique paru en 2002. Des astronomes ont étudié une étoile en particulier : S2, qui présente une orbite elliptique, dont l’origine ne peut être provoquée que par un objet supermassif en son foyer : l’hypothèse d’un trou noir supermassif d’une masse d’environ 3.5 million de fois celle du soleil s’est imposée comme la plus probable. Des études de 2009 ont pu permettre d'estimer avec une meilleure précision la masse du trou noir à 4 million de masses solaires;
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En mai 2018, le passage de l’étoile S2 au plus près de Sagittarius A* (c’est-à-dire à moins de 20 milliards de km) a permis de mesurer sa vitesse, dépassant les 25 millions de kilomètres par heure, soit 3 % de la vitesse de la lumière. D’un côté, ce surplus de vitesse ne satisfait pas les lois de Newton, mais de l’autre coïncide parfaitement avec la théorie de la relativité générale d’Einstein. De tels conclusions n’auraient pas été rendues possibles sans l’utilisation des instruments GRAVITY, SINFONI et NACO du Very Large Telescope (VLT).
⭐ Observation des Ondes Gravitationnelles dans le domaine optique
Vue d'artiste de la collision de deux étoiles à neutron causant la production d'une onde gravitationnelle le 17 août 2017 Crédit : ESO/L. Calçada/M. Kornmesser
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Le 17 août 2017, la collision de deux étoiles à neutrons situées à 130 millions d’années lumières a produit l’émission d’une onde gravitationnelle détectée par l'interféromètre LIGO aux Etats-Unis. Le télescope VISTA situé à Paranal fit partie des premiers à observer la répercussion de ces ondes gravitationnelles dans le domaine visible !
Au total, 70 observatoires dont les télescopes 2.2 mètres de la Silla, NTT, VLT et ALMA ont pu participer à cette campagne d’observation historique dans l’histoire de l’astronomie moderne.
Les ondes gravitationnelles sont de minuscules oscillations de l’espace-temps et doivent être causées par des phénomènes cataclysmiques au sein de notre univers afin d’être détectées. L’un d’entre eux est la collision d’étoiles à neutrons, comme le montre la détection GW170817.
Cette nouvelle découverte d’ondes gravitationnelles fut simultanément considérée comme la première observation d’une kilonova, un phénomène uniquement prédit par les théoriciens il y a une trentaine d’année dont l’explosion produit 1000 fois plus d’énergie qu’une nova.
⭐ Première Image d’une exoplanète
La planète 2M1207b (en rouge) et son étoile (en bleu). La première image d'une exoplanète. Crédit:
ESO
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L’observation directe nécessite quant à elle des optiques de pointe ayant une résolution très proche de leur limite théorique. C’est en 2005 que la première image d’une exoplanète fut réalisée, grâce au télescope Yepun du VLT et plus précisément grâce à son instrument NACO fonctionnant avec une optique adaptative, mise au point par l’Office National d'Etudes et de Recherches Aérospatiales (ONERA), le Laboratoire d'Astrophysique de Grenoble (LAOG) et les laboratoires LESIA et GEPI de l’Observatoire de Paris. Un tel système vise à corriger les perturbations de l’atmosphère et pour cette image, en l'occurrence, a permis d’atteindre une résolution de 0.054 arcsec/pixel sur la caméra CONICA de l’institut Max Planck.
⭐ Première Image d’une exoplanète en formation
Etoile PDS 70 et sa planète en formation (point brillant à droite). Crédit : ESO/A. Müller et al. |
SPHERE emploie une méthode de détection directe des exoplanètes. Pour permettre une telle détection, SPHERE contient 3 composants clés : un système d’optique adaptative, un standard pour supprimer au maximum les aberrations optiques de l’atmosphères et permettre d’atteindre une résolution élevée. Un coronographe dont le but est d’augmenter le contraste et de cacher la lumière très brillante des étoiles autour desquelles sont situées au contraire des exoplanètes très peu lumineuses. Et un système d’imagerie différentielle visant à supprimer toute lumière résiduelle provenant de l’étoile afin de ne garder que celle émise par la planète.
⭐ Découverte de la plus proche planète potentiellement habitable
Un télescope de plus grande envergure, comme le futur télescope extrêmement large de l’ESO (l'E-ELT) et son miroir de 39 mètres de diamètre permettra par exemple de lever le mystère quant à la présence de vie à la surface de Proxima b.
Les observatoires de l’ESO font partie des acteurs majeurs de la recherche en astronomie et astrophysiques du 21 ème siècle. Les futurs télescopes géants en cours de construction au Chili dévoileront encore plus de secrets sur notre Univers. Jusqu’où le progrès technologique en astronomie pourra-t-il nous emmener ?
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